Ljubljana est la capitale slovène. C’est une jolie ville, charmante et bourgeoise. Il est agréable de flâner le long des canaux pour chercher de quoi se restaurer dans les nombreux restaurants chics qui les bordent.
Les trois ponts du centre-ville en pierres blanches sont des ouvrages agréables pour les yeux. On a presque envie d’être en couple pour profiter de cela en se laissant prendre par le sirop d’un amour sucré comme une abeille dans un pot de miel. Mais allons donc, inutile d’être deux pour déguster ces moments. Les éclairages mettent très bien en valeur la richesse des architectures du mini-centre-ville. L’ambiance est sereine, bourgeoise et touristique, un mélange rassurant pour qui aime. Les flammes des bougies vacillent doucement sur les hautes tables le long de l’eau, caressées par une brise humide qui tendra vers le frais voir le froid au fur et à mesure de l’avancée de la nuit. Je rencontre quelques jeunes personnes sympathiques à l’auberge qui m’accueille. Je passe beaucoup de temps à écrire. Les gens m’en font la remarque. « Mais tu ne dors pas, t’écris tout le temps ? ». Si je n’écris pas, je me sens « boiteux ».
Je reprends la route vers 10 h. Il fait encore frais. Je cherche une piscine, j’en trouve une, mais elle est fermée. Je demande à mon GPS et en ultime requête, j’atterris dans un autre monde : la ville des magasins !
Il ne s’agit pas d’un grand centre commercial ou d’une zone d’activité, c’est véritablement une ville, avec même un marché au milieu des enseignes. Chaque building accueille des dizaines de marques. Des halles proposent aussi des espaces larges. Il y a des bâtiments de sport, des cafés, des restaurants, la taille du complexe est impressionnante et toujours en développement. J’ai l’impression d’être à Dubaï. Dans le petit marché aux fruits et légumes, je rencontre un jeune homme originaire du Kosovo. Dans ma tête d’Européen, le Kosovo est une région horrible où les terrains vagues agrémentent des champs de mines. les populations paysannes y sont vêtues de tissus bariolés et baragouinent un langage yougo incompréhensible, sous des sourires dorés sur les incisives. Ce garçon de 24 ans a émigré en Slovénie pour des raisons économiques, il y a 6 ans. Il tient un petit restaurant de sandwichs Kebab. Son rêve le plus cher, aller voir Miami. Pour le moment c’est impossible, il ne peut obtenir le visa états-unien, car il n’a pas encore le passeport slovène. Dans 6 mois, il obtiendra la clé qui lui ouvrira les portes de ses envies de voyages. Dans 6 mois, après avoir travaillé durant 6 ans en Slovénie. Il me parle de son jeune fils de quelques semaines et de sa femme. Il est heureux. Il me demande si moi-même j’ai une femme et des enfants. Il semble surpris que je lui réponde que non.
Il travaille douze heures par jour, tous les jours, dans son réduit d’alimentation.
Deux photos fixées maladroitement sur le carrelage blanc de l’un des murs montrent des paysages. Le Kosovo, c’est splendide me dit-il. C’est le plus beau pays du monde, c’est un nouveau pays blague-t-il. Mais l’économie y est trop faible. Je suis étonné de son parcours, de son jeune âge. C’est un homme. Qu’étais-je moi à 24 ans ?…
Il m’appelle « my friend » sur un ton extrêmement sympathique qui transpire la sincérité.
Je repars, il me souhaite une bonne route et me dit d’être prudent. Je suis touché par cette rencontre, simple et sincère.
…
Une traversée de l’Europe d’aujourd’hui à moto, en solitaire par Stéphane Lemaire
…