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La salle de concert Stéréolux a ouvert ses portes le 1er octobre, remplaçant l’Olympic. Depuis ces quelques mois, quel bilan peut en être retiré ? Réponses avec Éric Boistard, directeur de la structure.

Avez-vous définitivement refermé le livre “Olympic” ?

Eric Boistard : « Oui, nous avons refermé un livre le même jour où celui sur l’Olympic a été édité, donc le 15 mai, avec la dernière journée de clôture. Cependant, nous n’en sommes pas nostalgiques pour autant puisque le projet Stéréolux ne date pas d’hier. Nous avons travaillé dessus pendant 8 ans, j’étais donc été préparé à la fermeture de l’Olympic. Cela ne veut pas dire que notre cœur, nos souvenirs et peut-être même notre âme n’ont pas conservé l’Olympic à une bonne place, mais nous ne pouvions pas mener à bien notre nouveau projet dans ce bâtiment ».

Comment avez-vous conçu le “projet” Stéréolux ? Quel est sa singularité ?

E.B. : « C’est un projet un petit peu à l’image de Scopitone, qui s’appuie à la fois sur la musique, les arts numériques et qui est intergénérationnel – où les enfants, les adolescents, les adultes et les seniors sont concernés. Il est à la fois populaire, pour les gens d’ici, mais avec une capacité à rayonner à l’étranger et en France – si c’est un partenariat avec d’autres structures ou des artistes. C’est un projet du XXI siècle – dans « l’ère numérique » – calibré pour cette nouvelle période dans laquelle nous sommes rentrés depuis quelque temps. L’Olympic ne le permettait pas, les locaux n’étaient pas organisés et les technologies analogiques ».

Et que devient l’Olympic ?

E.B. : « L’Olympic devient, aujourd’hui, un lieu de travail pour les artistes, à la fois pour des musiciens, mais aussi pour des danseurs. Il va évoluer en un endroit de répétition, une résidence, et il pourra accueillir des formations artistiques et professionnelles”.

“L’Olympic restera un lieu artistique, le Maire y tient – et nous approuvons totalement – il pourrait même devenir une nouvelle Fabrique prochainement ».

Quel bilan pourriez-vous effectuer depuis l’ouverture de Stéréolux ?

 E.B. : « Tout d’abord, le bâtiment plait aux Nantais et au public. Avant l’ouverture, il est vrai qu’il y avait une angoisse du « public de l’Olympic ». Tous nous demandaient : est-ce que ce sera aussi bien ? Aussi sympa ? Aussi convivial ? Aussi peu cher ? Après l’inauguration, nous n’avons eu aucun retour négatif, que ce soit en direct, via la presse ou Facebook. Même les amoureux de l’Olympic sont venus nous dire qu’ils étaient très satisfaits par la salle micro, car elle ressemble un peu à l’Olympic, avec le bar au fond et le balcon.

En ce qui concerne la grande salle, je pense qu’elle est exceptionnelle, et ça, au niveau national ! Depuis l’ouverture, beaucoup de professionnels sont venus la visiter et grâce à elle, nous passons un cap au niveau de la musique et des arts numériques. Au final et à première vue, Stéréolux est un formidable lieu de vie ».

« Je pense que c’est une salle qui va faire date.”

Et qu’est-ce qu’en disent les artistes ?  Sont-ils tout autant enthousiastes ?

 E.B. : « Je pense que c’est une salle qui va faire date. Il y a une âme, il y a quelque chose. En tout cas, les artistes qui sont venus y jouer ou ceux qui viennent travailler ici, dans les labos, disent tous la même chose : c’est un lieu qui est vraiment bien organisé. Les musiciens souhaitent, lorsqu’ils viennent jouer, un son précis, qu’il n’y ait pas de parasitages entre la scène et la salle. Sur ce point, ils disent que c’est « formidable ». Le son sur la scène est extraordinaire. De plus, ils ont tout le matériel nécessaire à leur disposition, les artistes n’ont donc pas besoin de venir avec leur matériel comme lorsqu’ils jouent dans d’autres structures. Les deux salles plaisent beaucoup, nous avons vraiment de très bons retours ».

Le public est-il différent entre les deux salles ?

 E.B. : « Vous savez, nous n’avons pas un public par salle, mais un public différent chaque soir, par style musical… Nous pouvons difficilement le définir, notre projet est intergénérationnel. Il peut y avoir des enfants de maternelle comme des seniors, notamment avec l’atelier « Le thé numérique » où des personnes âgées viennent découvrir l’art numérique. Nous savions que cette juxtaposition à la fois de musiques actuelles et d’arts numériques allait permettre cette caractéristique intergénérationnelle.

Ce qui favorise également l’éclectisme du public, c’est de s’être installé en centre-ville. Nous sommes à deux-cents mètres du tramway, un bus passe à cinquante mètres d’ici, sans oublier que nous sommes sur une zone qui associe le tourisme et le travail du Quartier de la Création. Conséquence ? Les chiffres de fréquentations sont beaucoup plus importants :

“En huit semaines, nous avons accueilli les deux tiers du public que l’on avait en un an à l’Olympic.”

Le projet a tout de suite rencontré un beau succès et une belle fréquentation. Par exemple, l’exposition « Tripwire » a fait 6 500 entrées, avec des visiteurs de tous âges ! Et je dirais que les nouvelles branches – notamment le travail en direction du grand public pour les ateliers multimédias, celui dans le domaine de la création et du soutien aux artistes (en leur permettant de venir travailler ici) – rencontrent un grand succès.

Sans oublier que l’inauguration a été unique ! Avec ces 50 artistes en 3 jours, je ne connais pas un lieu en France qui a bénéficié d’une ouverture de la sorte ! Pour nous, cela a été une formidable rampe de lancement, parce que nous avons montré tout ce que pouvait générer le lieu et le projet, d’en montrer les différentes facettes.

De plus, je pense qu’il y avait un manque, notamment sur l’art numérique, sur les pratiques croisées qui associent son et images. La population générale est assez intéressée par ces choses-là, de plus en plus, et aujourd’hui, nous répondons à ses attentes ».

Vos concerts sont régulièrement complets, comment se monte une telle programmation ?

 E.B. : « Nous avons une salle plus grande, puisque la maxi contient 400 places de plus que l’Olympic (soit 1 300). Du coup, il y a deux catégories d’artistes : ceux qui seraient passés à l’Olympic et qui, aujourd’hui, peuvent espérer attirer plus de monde s’ils étaient complets à Chantenay ; et maintenant, nous pouvons accueillir les musiciens étrangers – qui tournent de moins en moins en France. Le principal levier, c’est quand même la capacité financière, car il y a une concurrence quand vous avez un Metromony qui va faire trois ou quatre dates en France, tous les équipements des grandes villes sont positionnés : Toulouse, Lyon, Bordeaux, Marseille, Lille, Strasbourg et Nantes, nous sommes dessus. C’est vraiment un plus par rapport à l’Olympic.

“Nous avons loupé de beaux moments par le passé !”

La salle micro est de 400 places, elle est intéressante en ce qui concerne les découvertes. Là, nous avons une moyenne de 297 spectateurs, mais il y a des concerts où nous en avons que 250. Ce qui est quand même intéressant, c’est que nous arrivons aujourd’hui – sur certains concerts – à avoir plus de monde qu’à Paris – au Trianon ou à La Maroquinerie – dans cette salle. Il y a aussi une vraie dynamique liée à la nouveauté du lieu, et donc les gens ont la curiosité de venir et de voir ! C’est un élément qu’il faut intégrer dans la réflexion, il ne faut pas se dire que nous sommes les meilleurs de la terre » !

Vous n’avez pas peur que l’effet de nouveauté qui attire aujourd’hui les gens, s’estompe au fil des mois ?

E.B. : « Logiquement, il va s’estomper au fur et à mesure. Entre novembre et décembre, Stéréolux a compté 10 concerts complets sur 14 dans la salle maxi et 4 sur 12 dans la salle micro. Il ne faut pas oublier que notre objectif n’est pas d’avoir des concerts complets, mais de montrer au public les artistes que nous pensons être intéressants. Nous n’avons donc pas peur que cette popularité retombe. Je ne peux pas prédire ce qui va en être dans les années à venir, mais je sais que Stéréolux à beaucoup de capacités ».

On sent que les gens ont ce besoin d’aller de plus en plus en concert, d’avoir du “live”. Comment se porte selon-vous le secteur du spectacle vivant à Nantes ?

 E.B. : « C’est vrai que le spectacle vivant n’a pas subi la même courbe que les ventes de musiques enregistrées, et heureusement pour nous ! Dans ce que vous appelez le live, c’est simplement être en visu et en interactivité totale avec un artiste sur une scène. Cela, les meilleures technologies auront du mal à le reproduire ailleurs que dans une salle de concert.

Même le jour où nous aurons un hologramme, l’ambiance chez soi ne sera jamais la même. Aujourd’hui, les salles de concert sont de plus en plus confortables, mieux organisées et sont des lieux de vie, où les gens viennent prendre du plaisir, partager des choses entre amis, se créer des souvenirs. De plus, les Pays de la Loire sont la quatrième région française – en terme de nombre de concerts organisés – derrière Paris, le Rhône-Alpes et PACA (Provence-Alpes-Côte d’Azur). Et nous avons la chance d’avoir, à Nantes, une habitude – historique et très contemporaine – de sortir aux spectacles et d’avoir des publics à la fois connaisseurs, avides de découvertes et tolérants ».

“Nous avons la chance d’avoir, à Nantes, une habitude – historique et très contemporaine – de sortir aux spectacles…”

Le public vient-il principalement de Nantes ou vient-il de plus loin pour un concert à Stéréolux ?

E.B. : « Je n’ai pas encore de chiffres sur Stéréolux, c’est encore trop tôt pour le dire. Je pense que ce sera la même chose qu’à l’Olympic : 20 % de nos spectateurs venaient de l’extérieur du département, soit un sur cinq. Nous le savons en croisant différentes données : les lieux de réservations, la ville où l’achat a été effectué, les codes postaux des gens qui achètent par internet par correspondance… 40 % de notre programmation est composée d’artistes étrangers, et il faut savoir que les gens font beaucoup de kilomètres quand ils veulent voir un artiste qui ne passe pas près de chez eux ».

Retrouvez toute la programmation de Stéréolux sur son site : http://www.stereolux.org